Billy The Kid – 1962

Prépublication dans « Spirou » (1210-1231) de juin à novembre  1961

Assurément l’un des scénarios les plus puissants qui soit sorti de l’imagination de René Goscinny. Les auteurs mettent en scène Billy the Kid, personnage inspiré de William Boney, célèbre truand mort à 22 ans après avoir abattu la bagatelle de vingt-et-une  personnes et qui inspirera au moins quatre films à Hollywood. Il avait déjà été évoqué dans « Hors la loi » et « Lucky Luke contre Joss Jamon » où l’on voyait une affiche promettant une récompense pour sa capture mais son visage d’alors n’avait rien à voir avec celui choisi dans cet album. Il portait même une moustache.
Billy the Kid est ici présenté comme un sale gosse capricieux et méchant, mais aussi encore très enfantin dans ses goûts et certaines de ses attitudes. Il boit du chocolat, mange des caramels mous et adore les contes de fées. Evidemment, c’est sur ce contraste que se base tout l’humour de cette aventure qui en remet une sacré couche sur la lâcheté de la population de Fort Wealking, la ville que le jeune bandit s’amuse à terroriser. Lucky Luke fait preuve d’une patience d’ange car il veut éliminer Billy par des moyens légaux au terme d’un procès équitable. La difficulté d’obtenir des témoignages à charge est un thème central de cette histoire beaucoup plus profonde qu’elle en a l’air.
Il fait aussi alliance avec un journaliste local, seul homme prêt à se dresser contre la puissance du terrible gamin. L’analyse de la puissance du quatrième pouvoir ne manque pas de sel. Le succès de Billy the Kid sera tel que les auteurs le reprendront quatre ans plus tard dans « L’Escorte », sorte de deuxième tome tout aussi réussi que le premier. Mais à la différence des Dalton, Billy the Kid ne sera pas utilisé comme méchant récurrent, sauf une apparition fugace dans « Jesse James ». Il en aurait été tout aussi digne.

Dans le site « Sens Critique », un internaute surnommé Volubilis 78 a écrit une critique élogieuse et très détaillée de « Billy The Kid ». En voici des extraits : «Billy the Kid, lest une réussite totale, l’un des meilleurs crus du duo Morris Goscinny, si ce n’est le meilleur. Voici les nombreuses raisons qui m’amène à le penser :

La structure du récit : deux premières pages d’ouverture qui présentent pour notre plus grand plaisir la genèse de ce gangster précoce, une ouverture vers un autre gangster, Jesse James, romantique à ses heures. Même au sein de l’album il y a un effet miroir dans le récit : le « rise and fall » de Billy avec comme point de bascule le faux procès.

Les personnages : Lucky Luke prouve qu’il est très loin de l’étiquette neutre et fade dont on a pu le taxer. Il a une extrême confiance en lui. Il regorge d’idées ingénieuses et s’impose comme un meneur naturel. Il a un coté faussement méchant que l’on connaît moins de lui. Enfin les personnages secondaires sont incroyables : son liseur et l’épicier pour ne citer qu’eux .

Le rythme : enlevé du début à la fin, toutes les cases sont exploitées avec minutie. C’est drôle, grotesque, flippant parfois ;

Le sujet de fond : il s’agit ici de la terreur et de son accommodement de la part de la population. Une lecture de Lucky Luke qui laisse songeur et qu’on peut prolonger prolonger par celle du Discours de la Servitude Volontaire (1576) d’Étienne de la Boétie.

Le gag

Les contes de fées.

La réplique

« C’est plus propre. »

Curiosité

L’une des cases de la première planche qui montre Billy the Kid bébé suçant le canon d’un revolver est censurée. Présente lors de la parution en feuilleton dans « Spirou », elle sera retirée dans les albums à l’exception du tout premier tirage avant de revenir à partir de 1981. L’histoire fait référence à Jesse James, futur héros d’un album de Lucky Luke, preuve que cet autre personnage légendaire de l’Ouest intéressait beaucoup les auteurs.

Caricature

Paul Dupuis (1907-1990), l’un des deux frères qui dirigeaient la maison d’édition du même nom.